Accueil > Avril / Mai 2012 / N°15
Le Lyon-Turin, un projet daubé
Cela fait quinze ans que les habitants du Val de Susa se battent contre le projet Lyon-Turin, cette autoroute ferroviaire pharaonique au coût de 24 milliards d’euros. Quinze ans que les médias français, et notamment Le Daubé, ne disent quasiment rien cette lutte importante (énormes manifestations – jusqu’à 80 000 personnes -, blocages, occupations, etc). Dans le même temps le quotidien des Alpes a multiplié les articles élogieux sur le projet, n’indiquant presque jamais qu’il pouvait poser problème.
Depuis quelques mois des riverains du trajet, indépendantistes savoyards, ou membres du collectif « NoTav Savoie », s’activent en France pour informer et résister au bétonnage programmé de leur territoire. Récemment plusieurs actions ont été réalisées dans l’agglomération grenobloise en soutien à cette lutte. Dans la nuit du 11 au 12 mars deux camions de Spie Batignolles, une entreprise participant aux travaux du Lyon-Turin, ont été brûlés dans ses locaux de Saint-Martin-d’Hères. Le 16 mars, la circulation des trains est perturbée en Rhône-Alpes après le sabotage des caténaires à Saint-Martin-le-Vinoux. Un peu plus tard, les trains stationnant en gare de Grenoble ont été tagués. Cette fois-ci la réaction du Daubé ne se fait pas attendre : le 26 mars, le sujet fait la « une » du quotidien qui titre « Les anti Lyon-Turin frappent en Isère » et nous promet une enquête en pages 2-3. En guise d’enquête Denis Masliah, le correspondant au commissariat du Daubé, se contente d’un récapitulatif des faits (dont Le Daubé avait déjà parlé dans de précédents articles) agrémenté de quelques remarques de la part d’un mystérieux « observateur » ou « interlocuteur bien informé », c’est-à-dire de la part de ses sources policières. Au passage (sur service commandé par ses sources ?) il en profite pour avertir les activistes : « Si les radicaux anti-Tav venaient à passer, si l’on ose dire, à la vitesse supérieure, ils pourraient avoir affaire aux services de l’antiterrorisme, ni plus ni moins ! ». Un exemple de plus pour montrer que Le Daubé mérite son qualificatif de « porte-parole de la police ». Car si le quotidien voulait réellement enquêter, il aurait bien mieux à faire que d’appeler les policiers pour les faire parler – anonymement, pour une fois - à propos des opposants. Il pourrait par exemple renseigner ses lecteurs sur les multiples nuisances que créera le chantier (qui a déjà commencé en Maurienne, comme nous l’avions raconté dans Le Postillon n°13). Il pourrait questionner la nécessité d’une telle infrastructure, la ligne existante de train étant sous-utilisée. Il pourrait enfin interroger les Verts sur leurs contradictions : pourquoi soutiennent-ils ce projet (en tout cas en Savoie et au niveau national), alors qu’il est tout sauf écologique ?