Accueil > Printemps 2024 / N°72

L’opéra de l’univers n’a pas pu être joué

Au Postillon, on l’écrit assez souvent : À Grenoble encore plus qu’ailleurs, l’argent public se déverse à grands flots sur les institutions scientifiques. Ceci dit, il faut néanmoins relever de grandes inégalités : quand les institutions publiques ou les entreprises privées œuvrant dans la « tech » palpent des milliards d’euros d’argent public, les projets moins « start-up nation » sont moins bien dotés. D’autant moins s’ils doivent composer avec les égos et ambitions des uns et des autres, qu’ils soient élus, universitaires ou concurrents sur le créneau de la « culture scientifique ». Illustration avec l’histoire instructive de Cosmocité, le nouveau « centre de sciences » métropolitain basé à Pont-de-Claix, racontée par quelques-uns de ses principaux acteurs.

Leur projet avait un nom poétique : « l’Opéra de l’univers ». Eux, un petit groupe de chercheurs enthousiastes ne voulait pas s’appeler « commissariat scientifique » comme toujours dans ce genre de projet. Alors ils s’étaient dénommés « la Fanfare de l’Opéra ».

Aujourd’hui, leur projet a abouti. Sont-ils heureux ? Pas complètement. Ils pensent surtout au gâchis qui a été fait de leurs belles idées. Ils pensent surtout à ce qu’aurait pu être « l’Opéra de l’Univers » et ce qu’est finalement devenu « Cosmocité ». Alors certains d’entre eux ont accepté de raconter leur histoire, parce qu’elle est instructive sur le fonctionnement institutionnel de notre cuvette high-tech. Les acteurs sollicités (scientifiques, médiateurs, muséographes, artistes) que nous appellerons « fanfarons » de façon générique dans la suite du texte, devant encore et toujours composer avec les financements publics, ont néanmoins exigé l’anonymat – en plus de se méfier du double sens du terme « fanfaron » : eux ne veulent pas se vanter de quoi que ce soit, simplement apporter de la matière à réflexion.

L’origine de cette histoire remonte aux années 2000, où quelques chercheurs grenoblois en astrophysique et en planétologie s’étonnent de l’absence de planétarium à Grenoble. Le plus proche se trouve à Vaulx-en-Velin, en banlieue lyonnaise, et sa philosophie et sa manière de fonctionner les font rêver. Planté au milieu des HLM, ce grand planétarium (de 15 mètres de diamètre et 152 places), fait la part belle aux relations arts‑sciences et soigne son intégration dans le quartier, veillant au mélange des publics. Alors les fanfarons se mettent à rêver : pourquoi pas faire la même chose en banlieue grenobloise ?

Les premiers fanfarons ne veulent pas limiter le futur planétarium à l’astrophysique ou à la planétologie mais l’ouvrir à toutes les sciences de la nature (géologie, climat, glaciologie, océanographie, etc.) dont les laboratoires sont regroupés au sein de l’Osug (Observatoire des sciences de l’univers de Grenoble). En recrutant dans les autres sciences, la fanfare atteint une trentaine de membres. En 2009, ils bâtissent un pré-projet : un planétarium de 120 places, une labellisation des associations locales d’astronomie ou de géologie, une plateforme d’observation géologique, un mur pétrologique, un jardin géologique, des salles d’expos et de conférences… La surface intérieure totale nécessaire s’élève à 1 200 mètres carrés. Il ne reste qu’à trouver le lieu et les financements.

C’est là que le parcours du combattant commence. Pour le lieu, les fanfarons pensent directement à la friche industrielle de Neyrpic, qui a l’avantage d’être située à la fois « au milieu des HLM » et à la fois non loin du campus où nombre d’entre eux travaillent. Rendez-vous est pris avec la mairie de Saint-Martin-d’Hères qui leur adresse une fin de non-recevoir : leur but sur ce terrain est plutôt de bâtir un consumarium, plus connu sous le nom de centre commercial (qui va ouvrir dans les prochains mois)… Le projet arrive aux oreilles d’un certain Christophe Ferrari, lui même chercheur au sein de l’Osug. En 2009, il vient d’être élu maire de Pont-de-Claix et cherche un grand projet pour « désenclaver » sa ville et augmenter son aura. Argument de plus, il a une friche industrielle à offrir : les anciens moulins de Villancourt, à la limite avec Échirolles. Les planètes semblent s’aligner alors les discussions commencent. Les astrophysiciens exposent leur envie de liens avec des artistes et avec la population locale. Ferrari applaudit à deux mains et un pôle artistique se met en place.

L’association des artistes et des scientifiques donne un premier nom de code au projet, la Cité Arts-Sciences (CAS). Ses promoteurs ont un an pour en prouver la faisabilité. Les artistes rêvent en grand eux aussi. Il leur faudrait un plateau de théâtre de 200 m2 avec pont lumières, une salle de répétition de 100 m2, un espace polyvalent de 150 m2 (accueil, centre de ressource, espace montage), des bureaux, des salles de réunion, de formation… Rien ne semble alors impossible ! Un fanfaron résume les grandes lignes du projet d’alors. « On le pensait comme le premier équipement arts-sciences conçu par les artistes et les scientifiques, pour amener leurs disciplines au plus près du grand public. Les visiteurs viendront pour apprendre, mais surtout pour s’amuser. Le but n’est pas d’asséner le savoir mais que les gens qui viennent avec leurs questions repartent certes avec quelques réponses, mais surtout avec des questions plus pertinentes. Le public y rencontrera scientifiques et artistes dans une structure horizontale, avec des échanges directs, des interactions fréquentes, loin des classiques conférences où le savoir est transmis pyramidalement, loin des spectacles dans lesquels les artistes évoluent sur une scène, bien séparés du public. De façon unanime, les acteurs de cet Opéra de l’Univers rejettent le tout numérique pour favoriser des expériences analogiques. Pourquoi ? Parce que l’écran ment. Il ne raconte pas la physique, mais comment un programmateur a codé la physique. Il s’agit d’un leurre cognitif. L’Opéra de l’Univers n’y sombrera pas ! »

L’alignement est aussi politique : en 2012 François Hollande est élu président de la République, tous les échelons de pouvoir (du maire à l’État) sont aux mains des socialistes, cela devrait faciliter l’avancée du dossier. « Les fées semblent se pencher sur le berceau, continue le fanfaron. Tout cela crée un enthousiasme communicatif !  »

Pendant que les réunions s’enchaînent, des chercheurs décident de travailler à leur implantation dans le quartier, en reprenant l’idée de spectacles à domicile réalisés par certains artistes (ou cinéastes). Commence alors une série de « conférences à domicile  » autour des sciences de la nature. Le principe : un habitant se pose une question sur l’origine de l’univers ou la formation des séismes, il invite des voisins et un scientifique vient gratuitement discuter du sujet autour d’un repas partagé. « Une des difficultés, raconte un autre fanfaron, c’est que la Fanfare avait imposé à la mairie de ne pas en parler, de ne pas institutionnaliser, de ne pas communiquer. On voulait créer une rumeur, une envie, et pas servir – et être asservi par – les jeux politiques. C’est très difficile pour les édiles. Ils ont tenu bon une fois, deux fois… À la huitième conférence d’appartement, ils ont craqué : un article dans le journal municipal. On a été furieux, nos interventions apparaissaient désormais comme une manipulation socialiste. Alors on a arrêté l’initiative, même si les politiques ont continué d’en parler. »

Un soir d’hiver, des astrophysiciens installent leurs télescopes entre l’arrêt du bus des Moulins de Villancourt et l’Amphithéâtre. Les passants peuvent ainsi observer Jupiter, Saturne, etc. La Fanfare a empêché la mairie de servir des petits fours et a imposé qu’il n’y ait que des thermos de thé et des petits Lu : contrairement aux clichés, une partie de ses membres est issue de milieux qu’on dit défavorisés. Il leur semble que le faste s’accorde mal avec des relations humaines normales. Là encore, la mairie est empêchée de communiquer sur l’initiative. « Mais la soirée est tout simplement magique » racontent les fanfarons.

Une première étude de programmation est réalisée et, même si les sociétés de conseil qui la mènent n’écoutent et ne respectent pas tous les rêves de la fanfare, ses conclusions continuent à porter la ferveur du projet. Selon ses chiffres, il pourrait attirer 120 000 visiteurs par an (!) pour un coût de 17 millions d’euros et un budget de fonctionnement de 1,1 million d’euros par an (avec l’embauche de 13 équivalents temps-plein), la moitié en autofinancement, le reste en subvention. Mais vu les retombées économiques de ce potentiel nouvel outil touristique, le fameux « territoire » semble avoir tout à gagner à investir dans un tel projet.

C’est sans compter les multiples enjeux de pouvoir auxquels doit faire face la Fanfare. Du côté des universités, c’est l’époque de la fusion, de la création de l’UGA (université Grenoble-Alpes) où l’Osug n’a pas une grande visibilité. À Pont-de-Claix, Ferrari se fait construire un phare sur un ancien château d’eau (voir Le Postillon n°33), provoquant l’indignation de membres de la Fanfare, choqués par ce puissant faisceau lumineux panoramique empêchant l’observation de l’univers…

Et surtout, le projet se perd dans les dédales des enjeux de pouvoir entre les grandes institutions, la commune, la Métro, l’UGA, et deux plus petites institutions : le CCSTI (Centre de culture scientifique, technique et industrielle – qu’on désignera par son autre nom dans le reste de l’article « la Casemate ») et la salle de spectacles de l’Hexagone. Toutes deux investissent déjà les créneaux de la culture scientifique et de la relation arts-sciences et voient d’un mauvais œil l’arrivée d’un concurrent qui va potentiellement les priver d’une partie de leurs financements publics très conséquents.

En 2014, Christophe Ferrari devient président de la Métropole, ce qui n’est pas forcément un avantage pour l’Opéra de l’Univers : « Immédiatement, son opposition l’accuse de se servir en premier dans le pot de confiture, les autres municipalités veulent leur part, et l’Opéra est appelé “son joujou” » racontent les fanfarons, qui pensent que les guéguerres politiciennes de la Métropole ont empêché le projet d’avoir un budget de fonctionnement suffisant. Pour l’argent ça commence effectivement à se compliquer : le gouvernement avait accordé 3 millions d’euros au projet via un « contrat de plan État région ». Mais en 2016, Laurent Wauquiez, tout juste élu président de la Région, active la « clause de revoyure » et récupère les 3 millions… Le projet, estimé à 17 millions, avait déjà été rabaissé à 14 millions suite à un tour de table des politiques. Suite au retrait de la Région, il doit maintenant rentrer dans une enveloppe de 10,7 millions d’euros . Il faut donc tout revoir à la baisse : planétarium réduit à 80 places, abandon de la restauration, des salles pour les associations et… abandon du pan artistique.

Les fanfarons y voient aussi, en dehors des raisons financières, le résultat du lobbying d’Antoine Conjard, le directeur de l’Hexagone, qui, en partenariat serré avec le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) propose une programmation relevant plus de la relation Art‑technologies que de celle Art-sciences. Conjard ne veut pas qu’une structure vienne marcher sur ses plate-bandes lucratives (en 2022, l’Hexagone a touché 750 000 euros de la part de la Métropole, au lieu des 515 000 de l’année précédente) et il trouve du relais auprès de l’élu nommé en charge du projet : Claus Habfast, élu grenoblois et vice-président de la Métropole délégué à l’enseignement supérieur, la recherche, l’innovation et l’international. Ancien communicant du Synchrotron et de l’Agence spatiale européenne, il ne partage pas la philosophie de la Fanfare, selon les fanfarons : « Il avait plutôt pour crédo la culture numérique ou l’annualisation d’un grand événement de culture scientifique et technique métropolitain à l’instar de Lyon et sa Fête des Lumières.  »

Profitant de la baisse de budget, la partie artistique est donc éjectée. Les désillusions s’enchaînent pour les fanfarons : «  Peu à peu, la Fanfare est muselée. Un point achoppe : le volet formation des médiateurs. Pour l’UGA, l’Opéra de l’Univers n’a pas à faire de la formation, qui est la vocation d’une université. Ainsi, les structures, dans leurs états d’esprit figés, reprennent peu à peu en main toutes les orientations originales des fondateurs pour faire de l’Opéra de l’Univers un banal outil de médiation de province. »

Encore pire : les huiles de l’UGA et de la Métropole manœuvrent pour que la Casemate devienne la structure porteuse du projet. «  Alors que pendant si longtemps, ses responsables ont empêché notre projet d’aboutir !  » fulminent les fanfarons. Le CCSTI-Casemate est transformé en établissement public de coopération culturelle (EPCC) dénommé Territoire de Science, qui chapeautera les deux, Casemate et Cosmocité. « Pour les chercheurs, c’est une catastrophe. Cela signifie clairement que peu de personnes seront employées pour faire tourner l’Opéra, et que le lien avec les labos va très largement se distendre. »

Devant ces mauvais tournants, les chercheurs râlent à chaque réunion. « Habfast nous répondait en nous demandant quel argent on avait à mettre sur la table...  » Alors pour les empêcher de râler, les huiles de la Métropole et de l’UGA trouvent une bonne solution : ne plus convier aux réunions ceux qui étaient à l’origine du projet…

Ils assistent maintenant d’un peu plus loin aux « passages obligés » d’un tel projet. Il y a les « séances de créativité » afin de soi-disant « co-construire le projet » et faire croire au peuple qu’il décide. Il y a la désignation de l’architecte, restée mystérieuse pendant longtemps. Il y a la désignation des prestataires pour le planétarium, la salle immersive ou la muséographie, toutes aussi mystérieuses. Pour la muséographie, c’est une boîte canadienne (!) qui est sélectionnée et qui traversera donc plusieurs fois l’Atlantique pour venir travailler…

En juin 2019 se prépare une nouvelle tartufferie : le choix du nom. À cette fin, un « atelier créatif » est organisé sous l’égide d’une boîte de communication de Lyon, dont les coûts demeurent également mystérieux. Encore une fois, il s’agit de soi-disant « co-construire ». Les réunions mettent dans une pièce quelques heureux informés, des post-it assemblés sur un tableau puis raflés par la boîte de comm’. Aucun compte rendu, aucun résumé : elle en fera bien ce qu’elle veut. Puis elle sort de son chapeau 3 propositions appelées à être départagées par un vote du grand public : Cosmocité, Pulsar et Micromega. À leur grand dam, les noms proposés par les chercheurs – Opéra de l’Univers ou Moulins de l’Univers – n’apparaissent plus – jugés trop élitistes. Passés les confinements, le vote a finalement lieu à l’été 2021. Pour une agglomération de 400 000 personnes, seules 3 000 votent et choisissent à 51 % « Cosmocité ».

Les travaux commencent, avec leurs multiples et inévitables aléas. L’architecte déclarera notamment : « Le problème, c’est que le budget est celui d’un groupe scolaire, et qu’on ne fait pas entrer 65 000 personnes dans un groupe scolaire.  » À l’époque, loin des 120 000 initialement espérés, les autorités ne tablaient même plus sur 65 000 visiteurs mais, pour réduire le nombre d’embauches, sur 45 000. La suite montrera en quoi ces prévisions étaient complètement sous-estimées.

En mai 2021, c’est la pose de la première pierre. Les membres de la Fanfare ont eu le droit de venir, à condition de ne pas dire un mot. Ceux qui parlent, ce sont toujours les mêmes (le préfet, le président du Département, le maire d’Echirolles, le recteur et bien sûr Ferrari) baratinant sur la beauté de la science et sur leur bonté de l’apporter au bas peuple. Parmi les logos apposés sur Cosmocité, il n’y aura pas non plus ceux des instituts des chercheurs de la Fanfare, travaillant depuis une quinzaine d’années sur le projet...

L’aménagement des installations est également une grande source de frustration pour les chercheurs, qu’on continue à solliciter… et à mépriser, comme le raconte un fanfaron : « Sur chaque poste des expos, la Fanfare fait travailler de trois à dix collègues, qui remontent des scénarii à la Casemate, qui contacte des muséographes qui sabotent le travail avec leurs méconnaissances scientifiques. Il n’y a jamais de lien direct entre les deux bouts de la chaîne. C’est la Casemate qui valide, c’est elle qui informe. Le plus tard possible, les scientifiques sont contactés pour validation. Parfois, les rendus sont si éloignés de la réalité qu’il faut organiser des réunions d’urgence, qui se concluent par des compromis insatisfaisants, des “bons à tirer” accordés à contrecœur par des scientifiques las et frustrés, pressés par la Casemate, qui de toute façon n’a pas de complément de budget pour des corrections de fond. »

On ne s’attardera pas sur les multiples ratés organisationnels mais à la fin, les chercheurs constatent amèrement l’existence de beaucoup d’erreurs factuelles et « un module de météo de l’espace incompréhensible parce que faux, une maquette 3D du bassin grenoblois qui ne répond en rien aux exigences des géologues, des films creux et laids projetés en grand dans les plateaux d’expo, un pendule de Foucault (développé à l’Observatoire de Grenoble) tellement bien caché qu’on passe devant sans s’interroger sur les mystères qu’il dévoile…  »

Au niveau des ressources humaines, les craintes de la Fanfare se confirment, avec très peu de moyens mis par la Casemate. Avant l’ouverture, les personnes bossant sur le projet sont avant tout des services civiques, des stagiaires et une personne mise à disposition par l’entreprise Atos via un mécénat de compétence… Les quelques salariés mis sur le projet par Cosmocité doivent composer avec les enjeux « géopolitiques » de la Cuvette qu’ils ne maîtrisent pas. Un fanfaron illustre : «  Le rejet de tout ce qui est local – et donc potentiellement concurrent et dangereux – va tellement loin que les veillées d’observations du ciel avec des télescopes sont confiées au représentant d’un club d’astronomie des Baronnies plutôt qu’à une association d’astronomes amateurs du coin, qui propose pourtant une meilleure offre, plus étoffée et moins chère.  »

En 2023, vient le temps des premières embauches, toujours avant tout motivées par des soucis d’économies. Cinq médiateurs sont embauchés et envoyés au front, sans les transmissions nécessaires, selon les membres de la Fanfare : «  Ces pauvres mais magnifiques médiateurs, noyés dans toutes les informations qu’ils doivent ingurgiter en quelques semaines, méconnaissent toute la démarche en amont qui a conduit à Cosmocité, qui est devenue, par la bêtise du monde politique, par l’impéritie d’un système de médiation englué dans ses habitudes et ses peurs, un centre de sciences comme il en existe partout ailleurs. Un bel outil sans originalité, sans saveur, qui ne sort surtout pas la tête de la tranchée, qui n’invente pas, qui ne s’ouvre pas.  »

Quelques semaines avant l’inauguration, le 30 septembre 2023, la Casemate se rend compte qu’il manque de moyens humains… et fait de nouveau appel à la Fanfare. Les innocents se remettent au travail, sans toujours avoir la moindre reconnaissance : sur le site Internet, les affiches ou les plaquettes, on peut voir les logos de toutes les grandes institutions (même de la Région qui a « piqué » 3 millions d’euros) mais toujours pas des instituts…

Début mars, après cinq mois d’ouverture, plus de 40 000 visiteurs s’y sont pressés. « Les journées à guichets fermés se succèdent à rythme constant, vacances ou pas  » affirme Le Daubé (3/03/2024). À ce rythme, même l’évaluation haute de 65 000 pourrait être pulvérisée, prouvant qu’il y a une réelle attente du public. Résultat ? Deux burn-out après un trimestre d’activité. L’équipe de Territoire de sciences compte 30 équivalents temps-plein dont la majeure partie pour la Casemate : 5 médiateurs et 4 chargés d’accueil pour Cosmocité, le reste pour… la Casemate. Un fanfaron se lamente : « Il arrive que le même malheureux médiateur doive s’occuper de plusieurs classes sur les deux plateaux d’exposition. Alors il distribue des questionnaires issus des cogitations préparatoires, en précisant : “venez me voir si vous avez des questions”. La négation de la médiation. Comment arriveront-ils à s’estimer, à être fier de ce qu’ils font ? Qui peut s’en satisfaire, après tant de rêve et d’invention ? » Et de constater que dans le fonctionnement actuel du centre de sciences, il n’y a aucun lien avec les labos, avec les associations de géologues et d’astronomes amateurs, avec la population locale, etc. Amer, il conclut : « Cosmocité est un bel outil, y voir courir les mômes est magnifique. Mais on soupire de tristesse devant tant de beaux rêves brisés. »

VIser la lune Une bonne idée ?

Dernièrement, les laboratoires grenoblois sont de plus en plus actifs dans les « tech & space » comme dit Le Daubé, ou plutôt en bon français : la colonisation de l’espace par les nouvelles technologies. Ainsi apprend-t-on régulièrement que des nanosatellites grenoblois volent au-dessus de nos têtes ou que des nouveaux téléscopes ont un bout de technologie grenobloise, sans parler des satellites Starlink d’Elon Musk conçus avec des puces de STMicroélectronics-Crolles.
L’espace ça fait rêver, en plus Thomas Pesquet est beau gosse et fait de belles photos, alors comment pourrait-on critiquer cette volonté d’accroître la connaissance et les possibilités de business en envoyant toujours plus de satellites dans l’espace ? Eh bien ce sera l’objet d’un article dans le prochain Postillon. Alors si vous êtes astronome amateur gêné par la multiplication des satellites dans le ciel, astrophysicien en plein questionnement existentiel ou amoureux du ciel tout court, n’hésitez pas à nous contacter !