La rubrique de la noix connectée du Postillon s’est fait complètement disrupter. Un certain Nicolas Baldeck, grenoblois d’origine, a obtenu un gros retentissement médiatique mondial grâce à une « patate connectée ». Faut dire que le bougre est parvenu à tenir un stand au CES de Las Vegas, le plus grand salon mondial de promotion des nouvelles technologies. Stand où il présentait une véritable « patate connectée », avec un dispositif qui « capte les ondes cérébrales de la patate, ou des interférences wifi de la patate, et transmet les signaux à une vraie intelligence artificielle installée sur un téléphone portable ». Gros succès pour cette « performance artistique » qui avait pour but de « pousser à la réflexion sur la pertinence de tout connecter » : Nicolas Baldeck a eu droit à des articles dans des dizaines de médias mondiaux dont BFM, La France agricole, La Repubblica, Forbes, Business Insider, Le Daubé, etc. « Ça a marché parce que j’étais pas dans la critique, nous explique Nicolas Baldeck. J’ai fait quelque chose qui n’était pas en opposition, alors les gens ont bien aimé. » Les gags sont en effet beaucoup plus attractifs médiatiquement que les discours critiques construits : les journaux s’extasiant devant le moindre étron connecté ont évoqué avec le même entrain cette « performance », sans s’apercevoir qu’elle questionnait également la servilité de la presse à l’égard de la moindre innovation technologique qu’elle promeut généralement sans aucun esprit critique.
L’autre victime du coup d’éclat de Nicolas Baldeck, c’est le prestige du CES de Las Vegas. Les entreprises grenobloises allant à ce salon communiquent comme si leur présence là-bas était une sorte de reconnaissance du milieu « tech ». En fait à peu près n’importe qui peut y aller : l’entrepreneur ès patatos a dû simplement payer 1 000 dollars et remplir un formulaire. Au téléphone, il nous raconte : « Le boulot des organisateurs du CES, c’est de vendre des stands donc il y a peu de sélection. Après il faut présenter quelque chose qui peut rentrer dans les critères, c’est-à-dire utiliser les bons mots. Moi j’ai parlé “intelligence artificielle”, “assistant personnel”, “application révolutionnaire”, alors j’ai été pris sans souci. » Voilà une bonne manière de résumer la fuite en avant technologique actuelle et tous les évènements « tech » de la cuvette ou d’ailleurs : peu importe le sens ou l’utilité des « innovations », il suffit d’utiliser quelques mots magiques pour susciter l’enthousiasme des technophiles.