Accueil > Été 2011 / N°11

Père Castor, raconte-nous une histoire de Grenoble !

Comment briller en société grenobloise ?

Père Castor n’est pas que ce vieillard sénile, rabâchant à qui veut bien le publier, des histoires de révoltes dépassées où l’on caillasse la flicaille à qui mieux mieux. Derrière les apparences, il n’a pas son pareil pour briller en société. Il vous donne quelques tuyaux pour impressionner vos amis.

Pourquoi y-a-t-il un trou dans cet immeuble ?

Si vous êtes déjà allés vous promener du côté des Trois Tours, de l’Hôtel de Police ou de la MJC mutualité, vous êtes sûrement passés plusieurs fois sous cet immeuble, à cheval sur la rue Hébert. Et peut-être vous êtes vous demandé à quoi pouvait bien servir cette grande fenêtre, découpée dans l’immeuble jusqu’au troisième étage  ?
Eh bien voilà. Au début des années 1970, l’agence d’urbanisme de l’agglomération grenobloise planche sur la réorganisation des transports en commun à Grenoble. Au milieu de projets assez classiques (tram, métro, autobus...) on envisage de recourir à des procédés plus originaux, et notamment aériens. Un de ces projets, le POMA 2000, conçu par la société fontainoise Pomagalski retient l’attention des décideurs politiques. «  Ce système se présentait sous la forme d’un train de petites cabines d’une vingtaine de places tractées par câble et circulant sur une voie au sol ou en surélévation  » Une démonstration grandeur nature fut même installée en 1974 à l’occasion de la foire d’automne à Alpexpo. Mais le projet fut finalement abandonné au profit du tramway, sous la pression notamment de l’ADTC (Association pour le Développement des Transports en Commun).
Aujourd’hui, on trouve encore à Grenoble quelques vides qui anticipaient le passage du POMA 2000. Et vous aviez fini par le deviner, c’est justement le cas de cette fameuse fenêtre  : elle devait permettre de laisser passer un téléphérique urbain.
Aujourd’hui alors que Poma installe un téléphérique urbain de 3416 mètres à Rio de Janeiro, nos décideurs envisagent d’en installer pour relier Grenoble aux montagnes alentour. Les projets Gières - Uriage - Chamrousse, et Grenoble - St Nizier faisaient notamment partie de la candidature de Grenoble aux JO 2018. Mais l’échec de la candidature ne semble pas décourager nos élus. D’ici quelques années, les grenoblois pourront-ils contempler de grandes fenêtres creusées dans la montagne, à l’endroit où devaient passer les télé-cabines d’un projet abandonné  ?

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Quel rapport entre Alain Carignon et Jean de la Montagne ?

Parce que les enfants aussi ont le droit de briller en société, Père Castor a exhumé de sa bibliothèque jeunesse un album pour enfants écrit par... Alain Carignon  ! Ce livre, édité en 1988 par Glénat et illustré par Anne Valla raconte l’histoire de Jean de la Montagne, habitant un petit village du nom de Bourveilland. Un jour, le village prend feu et tous les habitants quittent le village, à l’exception de Jean. Des années plus tard, il prend la route pour les retrouver.
On dit qu’un auteur s’identifie souvent à son personnage, et en lisant ce livre, difficile de ne pas penser que c’est le cas de Carignon, qui se rêve en bienfaiteur et en politicien intègre  :
«  Pendant ces trente années, Jean [...] avait beaucoup travaillé pour améliorer les conditions de vie de tous ses amis. Il était devenu le conseiller personnel de chaque famille  : on lui faisait confiance  ».
Et comment ne pas penser que c’est à ses propres obsèques que rêve Carignon à la fin de son livre  :
Lorsqu’il mourut, «  tous les habitants voulurent qu’un dernier hommage soit rendu à Jean. Et c’est son ami Paul qui trouva les mots pour graver à jamais dans les mémoires le souvenir de son ami. Une simple croix fut construite [...] Une phrase fut inscrite, qui est aujourd’hui la devise de Bourveilland :  ‘‘Le bien demeure dans toutes les mémoires’’  ».
C’est sûrement pour mériter une telle épitaphe que l’ancien maire de Grenoble, condamné pour faux et usage de faux, corruption, abus de biens sociaux (2 fois), et subornation de témoins avait décidé de reverser ses droits d’auteur à Grenoble Solidarité. C’est beau les rêves d’enfants...

A qui rêvaient les élites grenobloises en 1969 ?

En 1969, l’agence d’urbanisme de l’agglomération grenobloise publie «  le livre blanc pour l’aménagement de la région grenobloise  ». Cet ouvrage se veut «  un programme général d’aménagement du site grenoblois  » à l’usage des décideurs et des administrations, pour les dix années à venir.
A la fin de son étude, l’agence consacre un dernier chapitre à «  la part du rêve (1980-2010)  » dans lequel elle imagine ce que pourrait être le Grenoble du futur. Ponctué de quelques prévisions assez pessimistes, sur la pollution notamment, ce chapitre fournit en quelques lignes un aperçu du projet de technopole et de vie artificielle qui germe et se développe dans la tête des décideurs grenoblois depuis plus de 40 ans.
«  Cette approche s’appuie systématiquement sur la formule de Pierre Alain  : ‘‘N’hésitez pas à demander la lune, parce que si vous la voulez, la science peut vous la fournir’’  »
On vous laisse savourer ce qui faisait rêver les décideurs grenoblois d’il y a quelques années  :
«  1980 - Les régions Rhones Alpes et Provence-Alpes-Côte- d’Azur fusionnent pour former une entité administrative et économique à l’échelle européenne. […]
1984 - Deux usines thermiques nucléaires, dont la construction s’étalera entre 1980 et 1988, fourniront la totalité des besoins industriels en énergie du Y grenoblois, les déchets radioactifs étant enfouis dans les mines d’anthracite désaffectées de la Mure.
Une première est installée dans la cavité creusée par explosion atomique contrôlée, dans le calcaire du Rabot, cette opération ayant par ailleurs permis la construction d’un parking souterrain à 8 niveaux de 5000 places chacun.
La seconde implantée à St-Ismier, permet, par le rejet des eaux chaudes, des cultures fruitières et maraichères de primeurs ou de produits de serre à l’échelle industrielle à Meylan, Montbonnot, Saint-Ismier et Saint-Nazaire-les-Eymes […]
1990 - Le président de l’Assemblée générale inaugure à Saint-Vincent-de-Mercuze une étable collective moderne ou 400 vaches produisent systématiquement, par fécondation artificielle, des jumeaux bovins destinés à la viande de boucherie  ».