Accueil > Décembre 2018 - Janvier 2019 / N°48

A480 : on a trouvé les derniers climato-sceptiques…

« Les conclusions du Giec sont actuellement contredites par un certain nombre de scientifiques. Qui croire alors ? » Ces propos ne sont pas issus d’une discussion à la machine à café d’une start-up, mais sont écrits par des commissaires-enquêteurs. Ceux qui viennent de pondre le rapport sur la « demande d’autorisation environnementale » pour l’agrandissement de l’autoroute A480, l’autoroute urbaine grenobloise. Vu que plusieurs avis d’habitants hostiles à cet agrandissement leur rappellent les rapports alarmants du Giec (Groupe international d’études sur le climat) sur l’état de la planète (que l’agrandissement d’une autoroute ne devrait pas améliorer), les experts se défendent en argumentant : « Les commissaires-enquêteurs sont des citoyens à l’écoute des grands problèmes humains, ils s’informent, se documentent et sont à l’écoute des grands sujets publics. Ils ne prennent pas nécessairement une information pour bonne, sans avoir au préalable entendu les autres versions du sujet. (…) Bien qu’ils ne soient pas scientifiques, ils sont tenus d’avoir un ‘‘sens critique éclairé’’. » Et de conclure cette tirade en remettant en cause les conclusions du Giec. Quel « sens critique éclairé » qui, heureusement, ne s’est pas trop manifesté pour analyser les velléités d’Area, maître d’œuvre du projet, injectant 300 millions d’euros en échange d’une prolongation de ses concessions. Alors, malgré les coupes d’arbres, les dangers sur les digues du Drac et les nappes phréatiques, l’augmentation de la pollution que cet agrandissement entraînera nécessairement, la santé des habitants, ces soi-disant enquêteurs ont validé totalement le projet d’un point de vue environnemental, à deux ou trois recommandations molles près. Le clou du spectacle, c’est un calcul audacieux, quand ils affirment que le projet consiste seulement à « aménager 8,5 km par 2 x 18 m de large, soit 306 km2 [sic, en fait c’est 0,306 km2]. Qu’est-ce que 306 km2 par rapport aux 550 000 km2 de la France métropolitaine ? » Une rhétorique justifiant tous les projets inutiles : qu’est-ce que ce petit projet par rapport à la taille de la planète entière ? C’est quand même pas ça qui va trouer la couche d’ozone, hein ? Avec des raisonnements comme ça et leur « esprit critique éclairé », ils auraient pu au moins affirmer que la voiture ne polluait pas.