Si André Masin, président d’AFG (Association française de gestion d’établissements pour personnes autistes), n’avait pas souhaité répondre à nos demandes d’interviews, il n’a par contre pas tardé à réagir suite à la parution de notre article. Dans une lettre envoyée aux salariés de la structure (en réaction à notre article), il balance les habituelles défausses « leur intenter un procès serait leur faire trop d’honneur […] permettrait de rebondir et faire parler d’eux » et marginalise la position des familles qui ont répondu à nos questions : « La très grande majorité des familles des résidents et usagers ne partagent pas ces critiques fallacieuses, certaines familles ont exprimé publiquement leur total désaccord. » On n’a malheureusement trouvé aucune trace de ces expressions « publiques ». Dans cette lettre, il s’attaque aussi directement à nos sources. « Nous ne pouvons que condamner tant les auteurs de cet article que ceux qui l’ont alimenté ou cautionné. [...] Ceux restants sont aujourd’hui très marginaux et en totale inadéquation avec l’état d’esprit actuel de la structure. » Faut-il y voir une invitation à la démission ?
De nouveaux témoignages nous sont parvenus, comme celui de Roy, qui a travaillé en 2019 à Coublevie. Il a monté un véritable dossier sur son expérience, avec comptes-rendus, mails échangés et photos. Dans ses écrits, il raconte les crises des résidents, parfois très violentes, et évoque aussi la direction de l’époque qui le met en difficulté. En 2019, il avait envoyé ce dossier à plusieurs journalistes. « J’ai alerté l’ARS (Agence régionale de santé), la médecine du travail et plusieurs médias dont Le Dauphiné Libéré qui devait publier un article relatant ce qui se passe à la MAS du Guillon. » Rien n’est sorti. Nous ne publierons pas ici toute son expérience, qui rejoint la plupart des autres témoignages recueillis dans le précédent article.
Une autre lectrice raille l’histoire du lave-vaisselle (où une salariée se plaint de devoir faire cela en plus de ses autres missions), et se moque de la « surcharge de travail » induite. Cette même personne bien informée parle de « conditions de travail pourtant confortables, comparées à d’autres lieux de soin » et dénonce « un article simpliste et décourageant favorisant une attitude procédurière, réductrice et accusatrice, sans appréhender réellement la globalité de la situation ».
Paulo, qui a bossé un temps dans la structure souligne dans un autre mail : « On peut dénoncer les méthodes d’AFG, pourquoi pas ? Et oublier les autres associations locales... Pourtant sont-elles si “clean” que cela ? Parce que ce système bancal qui autorise les dysfonctionnements que vous décrivez n’est pas propre à un établissement et à une association. » Et d’ajouter : « Tout est organisé, en ce qui concerne la création de ces établissements pour qu’ils soient conçus, construits et administrés de façon la plus économique possible. » Un point que nous avions évoqué dans l’article.
En attendant, les résidents et les familles attendent que les choses aillent mieux. C’est ce qui ressort de l’échange de mails préparant une rencontre avec l’ARS, organisée mi-septembre 2021 : une des mamans constate « que les problèmes de la MAS perdurent et même deviennent de plus en plus graves ». Elle égrène les soucis enkystés :
« Il y a actuellement plus de 50 % du personnel de la MAS soit en congé-maladie soit démissionnaire », « certaines familles constatent une régression de leur enfant ». Un « manque crucial d’activités » et une « opacité des échanges avec la direction » sont aussi évoqués.
Rien de neuf sous le soleil de Coublevie. En juin, lors d’un conseil de vie sociale, le président d’AFG s’émerveillait pourtant : « Le chemin parcouru depuis un an est remarquable. Vous êtes dans la bonne direction. » En même temps, il annonçait le nom du prochain directeur, dont l’arrivée était prévue en août. Mais finalement lui non plus ne viendra pas.