Le 15 mars dernier, vers 6 heures du matin, un gigantesque incendie se déclare dans une ancienne résidence universitaire du Village olympique, en retrait de l’avenue Edmond-Esmonin. La Tour Canada, un bâtiment de cinq étages désaffecté, était squattée par plus de soixante-dix personnes, essentiellement des demandeurs d’asile soudanais et érythréens, ainsi que quelques Nigérians. Malgré l’intervention de quatre-vingts pompiers, dix-huit personnes ont été blessées et transportées au CHU de La Tronche, pour la plupart intoxiquées par la fumée. Pour échapper aux flammes, plusieurs habitants ont sauté des fenêtres. Une occupante a fini polytraumatisée.
« Plusieurs départs de feu simultanés »
Depuis, trente-neuf de ces demandeurs d’asile, d’abord mis à l’abri au gymnase Daudet, dans le quartier Capuche-Alliés, ont été provisoirement relogés au Centre départemental de la jeunesse d’Autrans, avant d’être prochainement dispatchés vers des foyers d’accueil. Tout est bien qui finit presque bien ? Pas forcément... Deux semaines après le sinistre, le mystère continue en effet de planer sur les causes et les circonstances de ce qui aurait pu devenir un véritable drame. Dans les jours suivants, on a régulièrement pointé la vétusté des immeubles du quartier. Une réalité certes, mais qui n’a pas valeur de preuve dans le cas présent.
Rencontré quelques jours après les faits, un membre d’une structure impliquée dans la gestion de l’incendie et les opérations de secours dévoile des éléments troublants. S’il tient à rester relativement prudent, il ne croit pas en tout cas à la thèse de l’accident : selon lui, « l’incendie était manifestement d’origine criminelle et plusieurs départs de feu simultanés – a priori cinq – auraient été recensés sur le bâtiment ». Plusieurs sources ont d’ailleurs fait état du placement en garde à vue, dans la foulée du sinistre, d’un individu à l’identité incertaine.
Mais depuis, plus rien ou presque. Après une couverture massive les deux ou trois premiers jours, les médias locaux ont très peu évoqué l’avancement de l’enquête et les diverses pistes possibles. Quant à la préfecture et aux services de police, leur absence de communication à ce sujet ne fait rien pour dissiper les doutes et rumeurs. Tout le monde semble ainsi se désintéresser des causes, du moins publiquement. Un black-out curieux.
« Probablement pour essayer d’identifier les personnes en situation irrégulière »
Autre bizarrerie, « d’après les pompiers, il y a eu un embrasement généralisé du bâtiment ; la façon dont le feu a pris est assez inhabituelle, indique notre informateur. C’est le genre d’incendie qu’on voit rarement en zone urbaine, là où les secours sont en général très rapidement sur place. »
Un second témoin pointe quant à lui les méthodes des autorités qui, derrière les opérations de sauvetage et mise à l’abri, auraient en réalité poursuivi un autre but , beaucoup moins glorieux. Il s’indigne ainsi de « la manière dont les habitants de l’immeuble ont été traités » lors de cette matinée du 15 mars. Explications : « Il s’est écoulé un temps assez conséquent [près de deux heures] entre le moment où les gens ont été évacués du bâtiment en flammes et le moment où ceux-ci ont enfin pu avoir accès aux premiers soins, par la cellule psychologique du Samu ou la Croix-Rouge » - exception faite, bien sûr, des quelques blessés les plus sérieux, immédiatement pris en charge.
Et celui-ci de poursuivre : « Dans ce temps intermédiaire, les gens ont été parqués par la police dans des conditions assez peu correctes. Probablement pour essayer d’identifier les personnes en situation irrégulière, ce qui semblait être la priorité du jour pour la préfecture... » Et les migrants de se retrouver, une fois de plus, pris entre deux feux.