Dans le quartier des Alpins, au sud de Grenoble, c’est la consternation : les habitants ont appris ce printemps que la Caf (Caisse d’allocations familiales) prévoyait de fermer le centre social du quartier d’ici 2017. Ce centre social intergénérationnel regroupe, entre autres, une halte-garderie, une ludothèque, des cours d’alphabétisation, des expos, des cours de couture, une permanence juridique, un lieu d’accueil parents-enfants, un jardin partagé, des cours d’informatique. Comme dans tous les quartiers sud de Grenoble, il n’y a pas beaucoup de lieux de vie aux Alpins. Les habitants sont donc très attachés aux rares qui existent. Ici de nouveaux logements seront construits et pourtant on ferme une infrastructure sans consulter les principaux concernés. « On a des bonnes raisons que l’on ne vous donnera pas » semble être la ligne adoptée par la CAF, appuyée par les élus de secteur.
Un Collectif des Alpins s’est formé, regroupant une cinquantaine de personnes, et a récolté 1400 signatures sur une pétition adressée à Claude Chevallier, directeur de la Caisse d’allocations familiales de l’Isère. Aux administrateurs, ils demandent : « la possibilité d’accorder un délai supplémentaire avant la fermeture de la halte-garderie [prévue pour ce mois de juin], l’implication de la CAF dans les discussions partenariales pour favoriser un projet de reprise par la ville ou une association, le maintien de la mise à disposition des locaux de la halte-garderie, a minima jusqu’à fin 2017, à la fermeture du centre social ». Pendant longtemps, la CAF a fait la sourde oreille avant d’accepter une réunion dernièrement.
Dans une lettre, Julia Boulon, porte-parole du collectif, habitante et mère de famille, témoigne : « Pas de rues à traverser, c’est du porte à porte pour tout le monde. La halte est, comme le centre, un puissant outil d’intégration : les petits peuvent être, dès leur plus jeune âge et pendant quelques heures, en immersion totale, ce qui ne peut que favoriser leur apprentissage rapide de la langue. La grande proximité, entre la halte et le lieu d’habitation de la grande majorité des parents qui y font appel, permet également aux personnes en recherche d’emploi de mener plus facilement les démarches qui leur sont nécessaires. »
Malgré les nombreux soutiens, Julia Boulon s’inquiète : « Tout le monde va dans notre sens et pourtant personne ne peut rien faire. Sans se placer sur l’échiquier politique, je m’attendais à l’appui des élus socialistes comme moyen de pression au niveau local. On se retrouve devant une structure qui fonctionne, des militants et des associations prêts à proposer des solutions d’aménagements et en face un discours incohérent qui met à mal la paix publique. Il y a un vrai besoin pour les usagers, parents, femmes en situation difficile, nouveaux habitants étrangers qui peuvent y trouver avocats, assistantes sociales, conseillers pour leurs différentes démarches (…). Ça paraît anodin, mais des tables, des chaises, de l’espace ça fonctionne, ça n’est pas une fantasmagorie, ça crée du lien social, socioculturel, intergénérationnel que l’on brise en se dissimulant derrière le ‘‘rien à cacher – rien à argumenter’’. »
Les incohérences des solutions proposées, le copinage des autorités laisse les habitants dans une situation proche de celle du lycée Mounier à l’annonce de sa fermeture ; écœurement, sentiment d’impuissance, forcing. S’exprime pour Didier Gabillault, un membre du collectif, « le sentiment d’être des cochons de payeurs. On paie pour ne pouvoir rien demander en retour. »
Le site internet du collectif : collectifdesalpins.wix.com/collectifdesalpins