Accueil > Avril / Mai 2015 / N°30
Mistral : La destruction est-elle une « ouverture » ?
Le délire de l’Anru (agence nationale de rénovation urbaine), débloquant des millions d’euros pour les quartiers populaires à condition que les municipalités décident de détruire des bâtiments, continue à Grenoble. Après la destruction stupide du 50, galerie de l’Arlequin à la Villeneuve, la mairie rouge-vert a annoncé la destruction prochaine de la barre Anatole-France dans le quartier Mistral. La première adjointe Elisa Martin a même été particulièrement fière d’annoncer au conseil municipal qu’ « éric Piolle est allé devant l’Anru pour témoigner fortement de notre volonté de poursuivre ce projet de renouvellement urbain, ce qui nous a permis d’obtenir des crédits à hauteur de 5,7 millions d’euros (...). Si nous nous sommes inscrits dans cette logique, c’est parce que nous adhérons à l’idée d’ouverture du quartier sur les eaux claires, les grands boulevards et le reste de la ville. Il est vrai que ce quartier souffre de son enclavement, marqué physiquement par un certain nombre de frontières, qu’il paraîtrait difficile de mettre à bas d’un coup de baguette magique ». La destruction de la barre est donc pour elle un moyen de faire tomber les « frontières » empêchant Mistral d’être un quartier comme un autre. Dans Le Daubé (27/01/2015), elle précise : « Parce qu’il n’y a pas de banlieues, pas de frontières dans Grenoble, une priorité importante sera de tourner le quartier Mistral vers le reste de la ville. » Cela fait plus de quinze ans que les aménageurs « ouvrent » ce quartier en détruisant des bâtiments (comme les anciennes barres Strauss) ou en déménageant les structures sociales à l’extérieur du quartier. Ces « ouvertures » ayant fait perdre une partie de son identité au quartier, les habitants ne vivent pas pour autant « mieux » qu’avant, et loin s’en faut (voir Le Postillon n°20). En dehors des beaux discours, une des raisons officieuses de cette destruction est la présence de nombreux dealers dans cette barre, et la très grande difficulté de les déloger. Mais s’attaquer à l’architecture est-elle la meilleure manière de résoudre des problèmes sociaux ? Est-il nécessaire de dépenser 5,7 millions d’euros d’argent public - sans compter les frais de « relogement » - pour faire tomber des bâtiments ? Au passage on peut remarquer que cette somme correspond à celle que coûtera à la mairie le fameux « désengagement de l’État » critiqué sans cesse par l’équipe municipale. Piolle n’aurait-il pas dû « témoigner fortement » de sa volonté de voir cette somme utilisée à d’autres fins plus utiles ?