Le Postillon chez le commissaire politique
Commissaire : Ah Le Postillon ! Vous êtes sur une mauvaise pente, vous : lors du dernier conseil municipal de Grenoble, le 18 juillet, votre journal a été cité par le Front national !
Le Postillon : Et alors ?
Commissaire : Vous commencez sérieusement à nous rappeler les heures les plus sombres de notre histoire ! Le conseiller municipal frontiste Alain Breuil a révélé au grand jour votre proximité intellectuelle. Lors d’un débat sur l’acquisition d’une œuvre d’art à 100 000 euros par le musée de Grenoble (subventionnée à hauteur de 50 000 euros par la ville, 25 000 par la Région et 25 000 par l’État), il en profite pour critiquer l’art contemporain et vous cite : « Je viens malheureusement de recevoir du renfort, dans le journal Le Postillon, dans son exemplaire de mars. Je précise que je n’en suis pas actionnaire et que Le Postillon à ma connaissance n’est pas un organe du Front national, mais il vous suggère lui aussi, vous qui cherchez à faire des économies, de faire des économies notamment sur le Magasin, que nous subventionnons à hauteur de 220 000 euros. Et surtout Le Postillon éclaire notre vision de l’art contemporain en nous expliquant que petites magouilles et petites affaires tiennent très souvent le haut du pavé et pour qui sait lire entre les lignes, il nous explique que tout cet argent public n’est pas perdu pour tout le monde. Je ne rentre pas dans le détail, mais on trouve dans Le Postillon des termes beaucoup plus audacieux que ceux que j’emploie ce soir. Il parle de pourriture de financement vous voyez, il parle de concussion et de relations incestueuses ».
Le Postillon : Là il délire un peu, nous n’avons jamais parlé de concussion, d’ailleurs on ne sait même pas ce que ça veut dire [NDR : « Infraction commise par un représentant de l’autorité publique ou une personne chargée d’une mission de service public qui, sciemment, reçoit, exige ou ordonne de percevoir une somme qui n’est pas due »].
Commissaire : Ne détournez pas le sujet ! Vous êtes complices avec les fascistes. D’ailleurs l’anti-fasciste Pierre Mériaux, qui vous avait déjà dénoncé comme « média d’extrême-droite » (Le Postillon n° 31, été 2015) n’a pas manqué d’entrer en résistance. Suite à l’intervention de Breuil, ce conseiller municipal écologiste a affirmé « Vous voulez que le politique choisisse les œuvres. C’est effectivement ce qui était le cas sous le troisième Reich par exemple ». Vous vous rendez compte ? Vous êtes sur la même ligne que des élus qui sont sur la même ligne que le troisième Reich.
Le Postillon : Non mais attendez, critiquer le marché de l’art contemporain ne revient pas à « vouloir que le politique choisisse les oeuvres », ni à être nostalgique du troisième Reich, ni à être sur la même ligne que des politiciens que l’on traite avec la même dose d’esprit critique que les autres (voir Le Postillon n° 25). Et ce n’est pas de notre faute si tous les autres élus n’émettent pas la moindre critique envers le business juteux de l’art contemporain. C’est pas parce que le Front national dit que l’air de Grenoble est pollué que l’on devrait soutenir qu’il est sain.
Commissaire : Tatatata. Arrêtez-moi toute cette logorrhée confusionniste. Il y a quatre ans déjà, la députée Fioraso avait asséné que vos « méthodes » lui rappelaient « des périodes troubles de notre histoire ». N’essayez donc même pas de vous défendre, vous êtes déjà condamné ! Vingt ans dans les terres froides du Nord-isère. Départ immédiat.