Accueil > Février / Mars 2012 / N°14
« On ne contrôle pas l’amour, c’est pour ça que c’est variable »
**Tribunal correctionnel de Grenoble, mardi 31 janvier
Le juge : - Vous n’aviez jamais été condamné ?
L’accusé : - Non
Le juge : - Faut bien commencer.
Un jeune homme s’est fait prendre sur le parking d’Alpexpo en train de voler à la tire dans une voiture.
Le juge : - Vous aviez pas mal bu. Vous avez dit : j’ai consommé 24 bouteilles de bière.
Les vigiles lui sont tombés dessus et l’ont roué de coups. Il est reparti avec les pompiers et est en arrêt de travail depuis. Un vigile a dit : « Il a dû se blesser tout seul, il a dû se jeter au sol ».
Le juge : - Acceptez-vous du Travail d’intérêt général (TIG) ?
L’accusé : - Oui.
Le juge : - Vous savez ce que c’est ?
L’accusé : - Non.
Le juge : - Donc vous acceptez sans savoir. Vous auriez pu demander, non ? Il lui explique. Alors vous acceptez ?
L’accusé : - Oui éventuellement mais pour l’instant je suis blessé .
Le juge : - Non mais si vous n’êtes pas apte au travail, le juge ne va pas vous envoyer au travail. Les juges peuvent être humains, quand même.
Le juge : - Combien de fois avez-vous été condamné ?
L’accusé : - Deux, trois fois.
Le juge : - Non, douze fois.
Un jeune homme et une jeune femme comparaissent pour une bagarre violente avec un couple de quarantenaires.
L’avocat de la partie civile, à la jeune femme : - Est-ce que vous êtes ensemble, ou pas ? Dans une déclaration, vous dites que vous ne sortez pas ensemble, dans une autre que vous êtes seulement amis, aujourd’hui vous nous dites que vous êtes sa petite amie. C’est contradictoire. Est-ce que c’est oui ou non ?
La jeune femme : - On ne contrôle pas l’amour, c’est pour ça que c’est variable.
L’avocat : - Oui, mais on contrôle ses déclarations à la police.
Le juge : - Si je vous parle de votre casier judiciaire, qu’est-ce que ça vous évoque ?
L’accusé : - Une catastrophe.
Le juge : - Huit condamnations. Vous avez récidivé de nombreuses fois. Vous ne comprenez pas les avertissements de la justice ?
L’accusé : - Si, je les comprends très bien, mais j’ai un problème avec l’alcool.
Deux trentenaires comparaissent pour avoir réalisé, le visage dissimulé, un vol avec violence et violation de domicile. Le « butin » a été dérisoire.
Le juge : - C’est une autre affaire, mais vous auriez aussi volé des lapins et des sacs de maïs. Pourquoi ?
Un des deux accusés : - Pour faire de la reproduction.
La victime du cambriolage connaissait un de ses deux agresseurs, était au collège avec lui, le croisait régulièrement dans leur petit village, savait qu’il avait des problèmes de santé et l’avait invité à boire un coup chez lui quelques temps auparavant.
La victime : - Ça m’a beaucoup touché. Je ne demande pas à être indemnisé. Je ne peux pas. J’ai de la chance, j’ai une bonne situation et je ne me rends peut-être pas compte de la réalité de personnes qui galèrent, qui ont des problèmes d’argent. Mais quand même ça m’a fait beaucoup de peine d’apprendre que c’était quelqu’un que je connais.
Dans le box, l’accusé a les larmes aux yeux.
L’accusé : - J’ai honte. C’est cette problématique de l’alcool qui est à la base de tous ces problèmes.