le mauvais plan soirée
Pour le résultat de chaque élection, la préfecture invite la presse et les élus à un moment mondain. Les résultats tombent en direct sur des écrans, et les politiciens les commentent aux journalistes. Le 23 avril, c’était ma toute-toute première soirée électorale. J’ai vu les immenses lustres de la préfecture et les tables remplies de champagne et de petits-fours. J’ai vu Michel Destot errer longuement dans les couloirs à la recherche d’un micro pour exposer ses brillantes analyses. J’ai vu des étudiants en journalisme se balader avec une caméra en sautant sur tout le monde, brasser du vent pendant trois heures pour réaliser un direct aussi vide qu’un live de BFM TV. J’ai vu des membres de la préfecture se féliciter qu’un de leurs tweets ait été repris par Beauvau (le ministère de l’Intérieur). J’ai vu le politologue Olivier Ihl faire les mêmes commentaires que les autres politologues. J’ai vu les soutiens de Macron arriver, forcément contents, mais sans sauter de joie. Car surtout, je n’ai pas vu d’émotion, pas de larmes, pas de cris, pas de visages bouleversés. Je n’ai vu ni passion, ni ivresse. J’ai vu la République dans tout ce qu’elle a de rationnel, de triste, de fade, de convenu, de froid. C’était prévisible, sans doute. Qu’est-ce que j’attendais ? Qu’une manifestation parvienne dans ces salons feutrés ? Qu’Olivier Ihl donne un coup de poubelle au préfet ? Que des élus bourrés sortent de leur langue de bois ? Qu’un lustre se casse la gueule ?