Accueil > Octobre 2011 / N°12

Silence, les robots dansent

Il y a des soirs où on se sent vraiment vieux con. Ainsi ce samedi 2 juillet, deux flâneurs pourtant jeunes du Postillon sont allés errer à la soirée «  Silence on danse  » organisée dans le cadre du Cabaret Raté au parc Paul Mistral. Le concept : une discothèque silencieuse, avec des DJ’s balançant du gros son dans 8000 casques prêtés à des djeuns avides de gros son. Les buts : faire parler de Grenoble pour cette «  première en France  » et montrer que la ville de Grenoble se préoccupe des nuisances sonores (casques = pas d’enceintes = pas de bruit = vieux cons électeurs voisins contents). Le résultat correspondait à peu près au cauchemar que l’on s’en était fait avant d’y aller : au milieu d’une multitude de pubs pour la ville de Grenoble et le Crédit Mutuel, une foultitude de danseurs casqués se déhanchaient nerveusement dans un silence assourdissant, laissant aux non-casqués l’impression d’être décidément hors du coup, comme après avoir raté une mise-à-jour ou l’installation d’un logiciel. La discussion avec quelques robots-danseurs interrogés – qui trouvaient, après une réflexion subtile et aboutie, que le concept était «  trop cool  » car «  nouveau  » - finit de nous déprimer. Et l’on se surprit à penser avec nostalgie aux vieux bals de village à papy, avec un vrai orchestre et une véritable ambiance. Eh oui des vieux cons, qu’on vous dit, qui en arrivent même à être d’accord avec les réactionnaires-qui-devraient-s’éclairer-à-la-bougie de Pieces et Main d’œuvre qui défendent dans un livre récent (*), que la techno (désignant ici l’ensemble des musiques électroniques), «  accompagne l’émergence du capitalisme high-tech, partageant sa soumission à la tyrannie technologique, son projet de monde hors-sol et sa fabrique de l’homme-machine postmoderne, qu’elle acclimate à son nouveau statut sous la bannière publicitaire de la fête  ».

(*) Pièces et Main d’œuvre, Techno, le son de la technopole, l’Échappée, 2011.

Portfolio