Accueil > Avril / Mai 2012 / N°15

Le tram à l’assaut des dernières maisons de la cuvette

En 1920, on pouvait se rendre en tramway de Grenoble jusque sur le plateau du Vercors, à Chapareillan, à Voreppe, à Vif ou à La Tronche. À cette époque les communes traversées comptaient souvent 4, 5, 6, 8, 10 fois moins d’habitants qu’aujourd’hui (environ un millier d’habitants à Crolles en 1920 contre 8500 aujourd’hui, 200 à Saint-Nizier-du-Moucherotte en 1920 contre plus de 1000 aujourd’hui, quelques centaines à Seyssins en 1920 contre 7000 aujourd’hui, etc). Si les rames n’étaient ni très rapides, ni très fréquentes, le tramway fonctionnait, et ne dut sa disparition totale, en 1952, qu’au culte grandissant de l’automobile.
Aujourd’hui, après un siècle d’évolutions technologiques «  révolutionnaires  », il semble qu’il ne soit plus possible de construire un tramway dans les mêmes conditions. Au XXIème siècle, pour avoir droit au tram, il faut un seuil critique d’habitants pour qu’il soit «  rentable  ». Le développement de ce moyen de transport à Grenoble est ainsi le prétexte à un vicieux chantage à la construction, subtilement dénommé «  contrat d’axe  ». La directrice des services de Saint-Martin-Le-Vinoux témoigne dans une vidéo : «  ces logements c’est vital pour la commune : d’abord car elle a perdu des habitants et ensuite parce que ça nous a véritablement permis de décrocher le tram. Sans ça on n’y serait pas arrivé  ». Le «  contrat d’axe  », dispositif soutenu par toutes les forces politiques locales - y compris ceux qui localement (Europe-Ecologie et l’UMP) dénoncent périodiquement la densification – impose aux communes qui accueillent le tramway de construire des centaines de logements. Au passage, «  crise du logement  » oblige, la nécessité de construire des centaines d’immeubles n’est jamais remise en cause, tout comme l’existence de milliers de logements vides dans la cuvette [1], les tarifs excessifs des loyers ou la politique d’attractivité intensive menée par les autorités locales ne sont jamais questionnés. La cuvette étant bientôt entièrement bétonnée, il faut maintenant s’attaquer aux dernières maisons de l’endroit. Et le tram est un bon prétexte, comme nous l’apprend l’adjoint à «  l’immobilier  » De Longevialle dans Le Daubé (13/02/2012) : «  Les maisons que nous connaissons encore sur le cours Jaurès/Libération ne pourront pas toutes résister à l’urbanisation des abords de la ligne du futur tram E  ».

Notes

[110 981 logements étaient vacants en 2008 dans la Métro (Source INSEE).