Accueil > Oct / Nov 2012 / N°17

Avec Lenny dans les contreforts de la Bastille

Dans l’aile du château

Pianotez «  Grenoble  » dans un moteur de recherches d’images et vous tomberez systématiquement sur une magnifique vue de la Bastille et de ses fameuses bulles. Essayez avec «  Tourcoing  » et vous comprendrez pourquoi la capitale des Alpes c’est vachement plus joli. La Bastille, c’est un peu l’emblème de la ville. Tout simplement parce que pour vider les poches des touristes, on imprime bien plus de tee-shirts et de mugs à l’effigie des bulles que de sets de table estampillés Minatec ou de caleçons aux couleurs du GF38.
La Bastille est aussi un lieu très fréquenté qui permet de surplomber rapidement Grenoble. Les premières pentes du Rachais et ses escaliers en pagaille fourmillent de sportifs haletants, de fumeurs de joints contemplatifs, d’amoureux enlacés, de paumés déprimés, d’anonymes retraités ou encore de joyeux alcooliques. Le Grenoblois y est peinard, loin des regards de la ville.
Dans les méandres des fortifications de la Bastille, il est quasiment impossible de se perdre  : la signalétique frise la perfection et les portes des casemates et autres cavités ont été fermées pour la plupart.
Il y a tout juste quelques mois, au pied de la via ferrata, des gens vivaient dans de petites grottes. C’est là que Lenny avait trouvé refuge. Depuis son antre, où il avait installé son lit, ses fauteuils et son étagère remplie de bouquins, Lenny voyait passer les acrobates du dimanche. à la mi-septembre les cavités, dont la sienne, ont été murées pour «  sécuriser la voie  » comme disent les autorités. Et Lenny a déménagé quelque part dans les murailles de la Bastille.

Avant d’arriver chez lui, un panneau indique «  Danger, zone interdite. Les falaises situées au fond de cette zone présentent des risques de chutes de blocs  ». Frelon et Médoc nous accueillent par leurs aboiements qui s’estompent rapidement. «  C’est moi qui ai récupéré ce panneau, je l’ai installé là pour ne pas être emmerdé   » explique Lenny qui nous propose un café. Il nous fait visiter ses deux petites pièces voûtées : «  Avant, où j’habitais j’appelais ça ‘‘la grotte’’, ici c’est ‘‘l’aile du château’’. C’est la chevalerie moderne ici.  » En pointant du doigt la pièce du fond, il poursuit : «  Le cheval était à côté, il y a même encore un anneau qui servait à l’attacher. Là, à la place de mon lit dormait le chevalier, il pouvait poser son armure ici. En tout cas, je suis bien mieux ici qu’à la via ferrata.  »
Lenny a 45 piges, il est né à Paris, a vécu dans le Morvan et à Clermont-Ferrand avant d’atterrir à Grenoble. On a passé quelques jours dans son monde bien éloigné des cartes postales et des moteurs de recherches.

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