Procès Emmaüs : Le Postillon relaxé
Le 26 mars dernier, on passait en procès au tribunal de Grenoble, après avoir été attaqués pour diffamation par Emmaüs Grenoble. Plus précisément par François Potin et Jean-Pierre Polidori, respectivement président et responsable d’Emmaüs Grenoble, dont les actes avaient été critiqués dans un article paru dans Le Postillon n°47 (automne 2018). Autant dire que lorsqu’on a reçu les citations à comparaître, on n’a pas été très fiers. Avoir un procès contre un grand élu ou patron, c’est presque glorieux. Contre Emmaüs, c’est assez dépitant. Alors à l’époque, on leur avait écrit un mail, aux deux responsables d’Emmaüs.
« On avait depuis longtemps entendu la rumeur d’une attaque judiciaire, mais on se disait “non, ce serait stupide de leur part”. En attendant, on n’avait pas mis l’article en question sur internet, comme on aurait dû le faire il y a trois semaines. Parce que comme mentionné dans l’article ce n’était pas un “plaisir” pour nous d’écrire un article sur Emmaüs : attaquer une structure sociale, c’est pas notre ligne éditoriale. Seulement, vu tous les témoignages parvenus, on ne pouvait pas éviter ce sujet. On l’a fait de la manière qu’on a estimée la plus juste - et on sait que vous n’êtes pas d’accord avec cette “justesse”. On l’a fait en espérant “rafraîchir des idées” et apaiser la situation, sans vouloir s’étendre sur ce sujet et faire de la lutte contre les dirigeants d’Emmaüs un étendard. Ne pas mettre l’article sur internet était aussi une manière de montrer cette volonté : sans existence numérique dans trois mois tout le monde aura oublié ce papier et vous pourrez continuer vos activités sans autre question dérangeante. Visiblement, vous ne voulez pas en rester là. On n’est pas bien placé pour juger, mais on pense que ce n’est pas stratégique de votre part. Car si vous nous attaquez, on va mettre l’article sur internet, coller des affiches qui parleront de ce sujet, faire des nouveaux dessins, des nouvelles caricatures : dans les prochains mois, on parlera forcément beaucoup d’Emmaüs, et donc de vous. Quelle que soit l’issue du procès, je ne pense pas que cela vous fasse de la bonne publicité. Surtout qu’on est confiants à propos de la solidité de notre dossier. Si en revanche vous abandonnez les poursuites, on ne parlera plus d’Emmaüs les prochains temps. Peut-être la meilleure des choses pour tout le monde. »
C’était une sorte de tentative de conciliation. Mais on n’a jamais eu de réponse à ce mail. Ou plutôt si : on a reçu une lettre recommandée de l’avocat d’Emmaüs nous expliquant que ses clients avaient pris ce mail comme une « menace ». D’ailleurs il s’en est même servi pendant sa plaidoirie, en s’insurgeant contre nos « méthodes ». S’il est insupportable pour lui qu’on puisse diffamer Emmaüs, il n’a contredit aucun des faits énoncés dans notre article, et pour cause : on n’a fait que retranscrire la vérité.
Son argumentaire n’a pas convaincu madame la juge : ce 14 mai, elle nous a entièrement relaxés, affirmant que « la bonne foi du rédacteur ne fait aucun doute ».
De plus, elle a condamné François Potin et Jean-Pierre Polidori à nous verser 1 000 euros solidairement en guise de « dommages et intérêts ». Comme nous nous y étions engagés, nous voulions reverser cette somme, une fois déduits nos frais de justice, à Emmaüs. Sauf que messieurs Potin et Polidori viennent de faire appel de cette condamnation financière. Affaire à suivre, donc.