Accueil > Décembre 2011 / N°13

Comparutions immédiates au tribunal de Grenoble, mercredi 30 novembre 2011 après-midi.

«  C’est un puits sans fond, un casier judiciaire  »

M. X., vingt-six ans, sans emploi, sans formation. Accusé d’avoir insulté et menacé («  enculés, fils de putes  » «  je vais vous planter, je vais vous lamer  ») des contrôleurs de la Semitag dans un bus suite à une «  fraude pour un arrêt  ». Avait un couteau sur lui. A été maîtrisé par les contrôleurs. Deux jours d’ITT pour l’un d’eux et un jour pour un autre suite à l’interpellation. Le juge insiste sur son passé chargé en condamnations :

  • «  Outrage en 2005, violence en 2006, vol avec violence en 2007, outrage en 2008 avec violence sur une personne chargée d’une mission de service public. Ça c’est la vérité des faits, ça.  »
    Le prévenu : - «  Vous n’étiez pas là pour voir.   »
    Le juge : - «  Mais je suis là pour lire votre casier judiciaire.  »
    Le juge demande comment se sont passées ses dernières peines de prison.
  • «  Ça s’est mal passé parce que pendant que je suis en prison, il ne se passe rien. Ma vie s’est arrêtée.   »
    Le prévenu reconnaît s’être énervé mais nie avoir menacé et avoir été violent. «  La caméra du bus ne marchait pas. Je n’ai aucune façon de prouver que ce que je dis est vrai. C’est ma parole contre la leur  ». Pour justifier la fraude, il explique «  Qui c’est qui ne fraude pas le bus ou le tram aujourd’hui ?  »
    L’avocat des contrôleurs dramatise un peu : «  Heureusement nous avons une équipe à la Semitag tout à fait remarquable qui utilise très peu son droit de retrait, tout-à-fait légitime par ailleurs. [...] Car les comportements comme celui de M. X. peuvent entraîner des droits de retrait et le lendemain les pires difficultés de circulation dans l’agglomération pour des milliers de personnes  ». A la fin de l’audience, un contrôleur bougonne en sortant : «  J’en ai marre de me faire insulter dans ce tribunal. Je te jure, je ne veux plus venir  ».
    Délibéré : six mois de prison avec mandat de dépôt, 900 euros de préjudice aux trois contrôleurs et un euro à la Semitag.

M.Y., dix-huit ans, sans emploi ni formation. Accusé d’avoir agressé, en compagnie de deux mineurs dont un de treize ans et demi, deux étudiants un soir d’octobre à 23h près de la caserne de Bonne. Aurait menacé l’un d’entre eux avec un couteau sous la carotide pour lui piquer sa sacoche et son Iphone. Reconnaît les faits, mais nie avoir fait usage d’un couteau. Est déjà en prison depuis une semaine pour une autre affaire, «  une rixe  » selon lui où il est «  présumé innocent   ».
Le procureur s’emporte : «  Ces actes sont une réalité qu’on peut croiser à cause de jeunes décervelés comme celui-là qui n’a que des explications minables et une intense mauvaise foi   ».
L’avocate de M. Y. explique que «  c’est extrêmement difficile pour lui, qui a dix-huit ans et deux mois, d’être en prison dans un quartier majeur. Il a peur d’y retourner et cela explique son comportement inapproprié aujourd’hui   ».
Délibéré : dix-huit mois de prison dont neuf avec sursis avec mandat de dépôt. Et 2000 euros de préjudice aux deux étudiants. Suite au verdict, M. Y., des larmes plein les yeux, embrasse ses parents qui ont assisté au procès et avaient déclaré aux policiers être «  dépassés par son comportement   ».


M. Z., soixante-trois ans, secrétaire d’association. Accusé d’avoir conduit sans permis en état d’ivresse avec 0,85 mg d’alcool dans le sang. Les gendarmes qui lui avaient retiré le permis l’ont vu arriver à la gendarmerie en voiture et en état d’ivresse. Il venait «  se jeter dans la gueule du loup  » pour être entendu en qualité de témoin car sa femme, «  souffrant elle aussi de problèmes d’alcool  », avait déposé une plainte pour viol. Plainte qui se révèlera quelques heures plus tard être «  fantasque  » selon le procureur et l’avocate de M. Z.. Lui-même regrette cette «  erreur  » grotesque due à son «  choc   » après avoir appris la nouvelle et assure avoir fait beaucoup d’efforts pour arrêter de boire. A déjà eu cinq condamnations pour «  conduites en état d’ivresse  ».
Le juge : - «  Si je vous parle de votre casier judiciaire, qu’est-ce que ça vous évoque ?  »
Le prévenu : - «  Il est un peu plein.  »
Le juge : - «  Vous savez, c’est un puits sans fond, un casier judiciaire, alors si vous continuez, il va continuer à se remplir.  »
Délibéré : cinq mois de prison avec mandat de dépôt et révocation de ses trois mois de sursis. Confiscation de son véhicule.